Dossier spécial - 2ème Conférence Européenne sur la Justice Restaurative

Publié le vendredi 15 décembre 2017
Accueil ActualitésDOSSIER SPÉCIAL / 2ème Conférence Européenne sur la Justice Restaurative

Le 23 novembre dernier se déroulait à Paris la 2eme conférence européenne Justice restaurative organisée par Citoyens et Justice dans le cadre de la semaine internationale de la Justice restaurative. Cette Conférence avait comme principal objectif d’engager des échanges sur la justice restaurative au regard de la recherche action menée au sein de quatre associations socio judiciaires depuis un peu plus d’une année (ASSOEDY de Versailles, Esperer 95, la Sauvegarde du Val d’Oise et l’ARSEAA de Toulouse, remplacée en cours d’expérimentation par l’ACJET 37 de Tours).

La première partie de cette conférence, animée par Denis L’HOUR, Directeur Général de la fédération Citoyens et Justice, était donc centrée sur la restitution de cette recherche action réalisée par l’Association de Recherches en Criminologie Appliquée (ARCA). Erwan DIEU, Olivier SOREL, co Directeurs de l’ARCA et Linda TESTOURI Responsable Projets & Formatrice de l’ARCA, ont présenté les différentes étapes de la recherche action et les méthodologies utilisées pour développer des outils pratiques à destination des quatre sites expérimentaux. Odile DESQUIRET, Directrice du service socio judiciaire de Esperer 95, Sylvie PHILBERT Directrice et Ségolène VAN WASSENHOVE, Chargée de mesures de l’ASSOEDY de Versailles ont apporté leurs témoignages sur la mise en œuvre d’un accompagnement restauratif dans des situations groupales. En effet, ces deux associations ont expérimenté ces outils dans le cadre des groupes de paroles à destination des auteurs de violences au sein du couple pour l’une et des stages de citoyenneté pour l’autre. Le processus restauratif exploré se base sur un travail de double décentration.

Concernant l’ACJET 37, qui a rejoint l’expérimentation suite à un empêchement de l’ARSEAA de Toulouse, le choix a été fait de proposer une médiation restaurative à partir de la mesure de médiation pénale. Hélène THIBAUD, Directrice de l’ACJET 37 a donc témoigné du processus qui s’est mis en place pour préparer les infracteurs et les infractés à cette rencontre particulière qui s’est déroulée après la médiation pénale.

Enfin, Émilie COHEN, Assistante sociale et Cathy CAMPOS, Responsable d’équipe – SAEMO Persans de la Sauvegarde du Val d’Oise ont souligné combien cette approche restaurative dans le cadre de la mesure d’AEMO spécifiquement mise en place pour des mineurs victimes d’agressions sexuelles dans la sphère familiale, était un outil complémentaire permettant d’accompagner une éventuelle reprise de liens entre l’auteur et la victime.

 

Première table ronde

Cette table ronde fut illustrée par la diffusion de différents films permettant de répondre à des questions spécifiques tant du point de vue des praticiens que du point de vue des personnes concernées. En effet, il nous a été possible de recueillir le témoignage de deux personnes (auteur et victime) qui ont pu bénéficier d’un accompagnement via les outils développés par l’ARCA. Ces témoignages mettent notamment en lumière que si la rencontre physique entre l’auteur et la victime n’a pas pu se faire dans toutes les situations, les temps de préparation et le fait d’intégrer d’une « autre manière » la victime ou l’auteur aboutissent à des effets restauratifs. Cela permet de proposer un accompagnement restauratif dans des situations dites non favorables (auteur inconnu, refus d’une des parties, difficultés à s’exprimer, etc…).

Lors de la Conférence, l’ARCA a animé des ateliers pour permettre aux personnes qui le souhaitaient de venir tester les outils développés dans le cadre de la recherche action. L’outil de réalité virtuelle a notamment rencontré un très vif succès.

 

Point de vue d'une experte européenne sur l'approche Citoyens & Justice

Estelle ZINSSTAG, Chercheuse et membre associée du Scottish Centre for Crime and Justice Research à l’Université de Glasgow a clôturé cette table ronde en apportant son expertise européenne et son regard extérieur sur l’approche développée par Citoyens et Justice et l’ARCA. Elle soulignait dans un premier temps l’enthousiasme que ce projet avait suscité et elle notait ensuite l’importance du chemin parcouru depuis son intervention de 2016 lors de la 1ere Conférence de Justice restaurative organisée par Citoyens et Justice. Elle attirait l’attention de l’assemblée sur le processus restauratif et le temps d’appropriation nécessaires à un pays.

 

Rencontre entre Good Lives Model & Justice Restaurative

Bérengère DEVILLERS, Attachée au Groupe Antigone de l’Université de Liège en Belgique, a présenté le Good Lives Model, approche qui se définit comme « un cadre conceptuel pour assurer les conditions pour le développement d’un plan concret et réalisable pour la réhabilitation en se concentrant sur les moyens individualisés et réalistes ». Elle soulignait également qu’avant de penser le lien restauratif vis-à-vis de la société il y avait peut-être à repenser la restauration du sujet vis-à-vis de lui-même. En ce sens la justice restaurative devrait donc s’inscrire dans un cadre souple et flexible qui permette des réponses singulières, individualisées mais aussi globales et intégrées. Elle envisage la justice restaurative comme un déclencheur, un tremplin vers un désistement, un programme de réhabilitation « potentiellement significatif dans un voyage vers la Désistance » (Robinson & Shapland, 2008)

 

Deuxième table ronde - La pluralité des approches : Une richesse pour la Justice

Une deuxième table ronde fut consacrée à la pluralité des approches qui, de notre point de vue, constitue une véritable richesse pour notre système judiciaire et pour les personnes accompagnées dans le cadre judiciaire. Ainsi, Émilie MATIGNON, Chargée de Mission Recherche et Formation à l’Institut Français pour la Justice Restaurative nous a fait part du travail réalisé par l’Institut pour développer la mise en place de mesures de justice restaurative, tant du point de vue des actions de sensibilisation, de formation des professionnels que des différents programmes accompagnés par l’Institut. Elle a notamment évoqué les différentes phases nécessaires au développement d’une mesure de justice restaurative à savoir une phase préalable (comité de pilotage, définition d’un cadre, etc..), une phase préparatoire (destinée à préparer les participants) et une phase opérationnelle.

Véronique DANDONNEAU, Juriste-chargée de mission de Citoyens et Justice a exposé l’approche singulière de la fédération qui a consisté à partir des mesures socio judiciaires existantes de proposer des outils permettant aux associations socio judiciaires de développer un accompagnement restauratif. Citoyens et Justice a ainsi souhaité s’appuyer sur l’expérience acquise depuis plusieurs dizaines d’années tant sur le champ de la justice restaurative que sur l’accompagnement socio éducatif dans le cadre des mandats confiés aux associations. L’objectif est notamment de permettre une démocratisation de la justice restaurative au regard des flux judiciaires auxquels les associations sont confrontées au quotidien. Elle notait également parmi les différents défis de la justice restaurative celui de la nécessité d’obtenir des éléments objectivés tant sur le nombre de personnes bénéficiant de la justice restaurative que sur le temps et les moyens nécessaires à sa mise en œuvre.
Erwan DIEU, Chercheur et co Directeur de l’ARCA, a clôturé cette table ronde en mettant en perspective les différentes approches et en soulignant que cette diversité était source d’enrichissement permanent et devait permettre aux personnes de trouver des outils répondant au mieux à leurs besoins.

 


Dernière table ronde - Comment co-construire une justice restaurative à la française ?

La dernière table ronde a réuni les principales Directions du Ministère de la Justice impliquées dans le développement de la Justice restaurative. Ainsi, Anne RIVIERE, du Service d’Accès au Droit et à la Justice et de l’Aide aux Victimes, Claire VUILLET et Laëtitia COSTANTINI de la Direction des Affaires Criminelle et des Grâces, Sasha RIFFARD de la Direction de l’Administration Pénitentiaire et Cécile LALUMIERE de la Protection Judiciaire de la Jeunesse nous ont apporté des éléments concernant l’état d’avancement des réflexions de leurs Directions respectives. Cécile LALUMIERE a notamment convié Citoyens et Justice à un groupe de travail technique sur la mise en œuvre de la Justice restaurative auprès des enfants et des adolescents. Les Directions ont également annoncé la prochaine réunion du Comité national de la justice restaurative, instance qui pour le moment reste « fermée » et ne concerne que les Directions du Ministère de la Justice.

Des échanges nourris ont eu lieu avec les participants qui ont grandement sollicité les Directions du Ministère de la Justice sur des thèmes aussi variés que le développement de la formation ou l’utilisation des résultats de la recherche action de Citoyens et Justice par le Comité de justice restaurative, …

 

 

Jeanne CLAVEL, Présidente de la Commission Justice des enfants et des adolescents de Citoyens et Justice et Géraldine DUCHEMIN, Présidente de la Commission Pré sententielle majeurs de Citoyens et Justice ont réalisé une synthèse de cette journée qui a été clôturée par Élisabeth PELSEZ, Déléguée Interministérielle à l’Aide aux Victimes.

Thierry LEBÉHOT, Président de Citoyens et Justice a indiqué que la richesse des échanges était source de perspectives intéressantes et que d’autres temps de rencontres étaient à prévoir.

Partager cet article Partager sur Facebook Partager sur Twitter Partager sur Linkedin
arrow_upwardTOP